Le deuil périnatal précoce en PMA, quel impact pour l’avenir ?
- Marie Sery-Leclerc
- 9 juil. 2024
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 janv.

Trop souvent sous estimés, le deuil périnatal précoce et ses conséquences marqueront à jamais les parents qui les vivent. Négligée, la perte d’un embryon ou d’un jeune fœtus, amène souvent les familles à vivre cette épreuve dans l’isolement afin de ne pas subir de jugement ou de commentaires maladroits. Pour aider à lever le voile sur cet aspect important de la maternité, j’ai eu envie de consacré cet article au deuil périnatal précoce qui est particulièrement présent lors des parcours PMA.
1/ Qu'est-ce que le deuil périnatal précoce?
Le terme « deuil périnatal » fait référence à la perte d'un bébé durant la grossesse ou peu après la naissance. Cela inclut donc les fausses couches (avant 20 semaines de gestation), la mortinaissance (après 20 semaines) ainsi que le décès néonatal (après la naissance). Le deuil périnatal précoce, désigne dans cet article, les arrêts naturels de grossesse avant la 20ème semaine (fin du 4ème mois de grossesse). Ce type de deuil est particulièrement douloureux car il est négligé, alors qu’il implique la perte non seulement de l'enfant attendu mais aussi des rêves et des espoirs liés à sa venue.
- Fausses couches ou arrêt naturel de grossesse :
La perte de l'embryon ou du fœtus avant la 20ème semaine de grossesse.
- Mortinaissance :
La perte du bébé après 20 semaines de grossesse mais avant la naissance.
- Décès néonatal :
La mort du nouveau-né peu de temps après la naissance, dans ce cas, on s’éloigne du deuil précoce…
Il y a quelques années, on ne parlait pas encore de deuil périnatal précoce. Les femmes qui faisaient des "fausses couches" précocement ne savaient pas qu'elles étaient enceintes. Pour elles, souvent, c'était un retard de règles, s’en suivait des règles abondantes, comme si c'était pour le corps une façon de se rattraper. Aujourd'hui, grâce à la science, aux tests de grossesse, aux prises de sang et aux échographies, on sait très rapidement si on porte la vie ou non. Alors forcément quand le cœur s'arrête de battre, c'est un bout du cœur de maman qui s'en va.
2/ Comment traverser ce deuil?
Vivre un deuil précoce, en parler et se faire aider : est-ce un aveu de faiblesse ?Accepter de ressentir la douleur de la perte d'un bébé, quelque soit son âge gestationnel, en jour, en semaine, ou en mois, c'est accepter d'avancer. Grâce aux test de grossesse, aujourd'hui, nous savons. Alors c'est normal de ressentir des émotions comme de la tristesse ou de la colère... Le voile est tombé. Le cerveau ne peut pas ignorer ce qui se passe dans le corps. La grossesse s'arrête et les projets qui se construisaient avec, s'arrêtent également. Les conséquences psychologiques du deuil périnatal précoce sont encore à ce jour sous-estimée.
- Accepter la douleur
Reconnaître et accepter la douleur émotionnelle et physique est crucial. C’est normal de ressentir des émotions intenses, comme la tristesse, la colère ou la culpabilité.
- Oser demander du soutien émotionnel
Parler de votre perte peut aider à soulager une partie du chagrin. Les groupes de soutien pour les parents ayant vécu une perte périnatale peuvent également offrir un espace de partage et de compréhension.
- Vivre une cérémonie ou des rituels
Parfois, certains parents trouvent du réconfort en organisant une cérémonie ou en créant des souvenirs (comme un album photo, une lettre à l'enfant, etc.) pour honorer et se souvenir de l'enfant perdu.
- Prendre soin de soi
Prendre soin de sa santé physique et mentale est essentiel. Cela peut inclure une alimentation équilibrée, de l'exercice, du repos et des activités qui vous font du bien.
3/ Cas particulier de l'échec d'une implantation lors d'un traitement de PMA
Lorsque l'implantation de l'embryon n'aboutit pas, cela peut impacter fortement le moral du couple. Les conséquences psychologiques peuvent être importantes : détresse émotionnelle, anxiété, dépression, culpabilité, honte... et la liste n'est pas exhaustive. Pourtant, si on prend du recul et qu'on regarde le cycle naturel de la fécondité, c'est normal que chaque embryon ne s'accroche pas. D’ailleurs, si tous les embryons de toutes les femmes s'étaient implantés et développés, le taux de natalité serait incroyablement élevé, inimaginable.
Mais ce qu'il faut comprendre avec ce parcours, c'est que depuis le tout premier jour, tout est contrôlé, rythmé, programmé. Le cerveau sait tout. Il doit savoir. Il doit maîtriser. Cela fait partie de ce que l’on nomme l'anticipation. Alors oui, c’est une bonne chose, les parents s’adaptent et contrôlent tout, de l’alimentation aux signes corporels. Mais le jour où ça coince, où ça rate, où on est face à un échec, là, il faudrait laisser faire, oublier, faire comme ci rien ne s'était passé. Impossible.
Le jour du transfert, ce petit embryon est annoncé comme « viable ». On s'imagine alors bébé grandir en nous, on projette cet enfant attendu dont on a tant rêver. Puis 10 à 15 jours après ce transfert, la sentence tombe. Rien. Il ne s'est rien passé. Le cycle recommence, la vie reprend son cours, une nouvelle étape du parcours arrive. Cet embryon, il faut l'oublier, faire comme s'il n'avait jamais existé. Souvent, les questions arrivent.
"Et si j'avais fait plus attention ? Et si j'avais mieux manger ? Et si j'y avais moins pensé ? Dois-je abandonner l’idée de devenir maman ? Pourquoi les autres y arrivent et pas moi ?"
Et pourtant, c'est statistique, tous les embryons ne s’implantent pas. C’est la vie, avec ses mystères . Et même si la science vient donner un gros coup de pouce, il y aura toujours des paramètres que l’on ne maîtrise pas.
Ainsi, pour un échec lors d’un transfert d’embryons suite à une FIV, on ne parle pas de deuil périnatal. Et pourtant, l’impact peut être similaire pour certaines familles, qui sachant que l’embryon est viable, se projettent avec cet enfant tant désiré.
[En PMA, les taux sont-là. En moyenne, en 2020, une femme avait entre 22 et 29% de chance de poursuivre une grossesse dite échographique, au delà du 1er trimestre. Ces taux varient notamment en fonction de la technique utilisée, du centre d'AMP et de l'âge des femmes.
4/ Aller de l’avant et se projeter vers une nouvelle grossesse
Il est important de prendre le temps de guérir, il ne faut pas se précipiter. Le deuil est un processus individuel et non linéaire. Prendre le temps de guérir émotionnellement et physiquement est crucial avant de tenter une nouvelle grossesse.
Il peut être intéressant d’essayer de comprendre les raisons de la perte, même si celle-ci peut souvent rester inexpliquée. Discuter avec son gynécologue peut apporter un sentiment de confiance pour avancer dans un nouveau protocole.
On ne le répétera jamais assez, mais le soutien est primordial. Qu’il provienne d’un professionnel de santé comme un psychologue, ou d’un proche, être soutenu fera toute la différence pour traverser cette épreuve.
A travers cet article, j’espère vous avoir apporté un peu de transparence sur l’impact du deuil périnatal précoce. C’est un processus complexe et profondément personnel. Il est important de reconnaître que chaque personne vivra ce deuil à sa manière et à son propre rythme, y compris au sein d’un même couple. La communication est alors essentielle pour ne pas entrer dans une spirale d’isolement mutuelle, qui mettra le couple en difficulté pour l’avenir.
Papa et Maman de cœur, vous n’êtes pas seuls.
Belle et douce journée.
Marie.
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